Plusieurs défaillances d’entreprises de construction de maisons individuelles ont été constatées en raison de la hausse du prix des matériaux et la perte de pouvoir d’achat

Il est sans doute là le plus grand défi du, ou de la future Première ministre française. Alors qu’on attend toujours de savoir qui siégera à Matignon, des milliers de Français se trouvent sans solutions face à la crise du logement. Loyers trop élevés, logements sociaux saturés et travaux énergétiques à effectuer rendent difficile la vie des locataires comme des propriétaires. Depuis plusieurs mois, le logement est même frappé par la multiplication des défaillances d’entreprises de construction, qui stoppent littéralement des chantiers pas encore terminés. « Ma maison était presque finie mais est pour l’instant inhabitable », confie Daniel, client du constructeur breton Maisons Kervran

Liquidée en juillet, « l’entreprise est sur répondeur. Le commercial ne répond plus, ni le maître de chantier. On n’a aucun moyen de les joindre ». Fin juillet, un autre constructeur, AST (Rhône), qui se présente comme le deuxième constructeur français de maisons individuelles, a vu son plan de sauvegarde rejeté par ses créanciers. Près de 600 emplois sont menacés.

Un niveau extrêmement bas des permis de construire

Et ils ne sont pas les seuls ! De nombreux constructeurs de maisons individuelles subissent la violente crise de l’immobilier neuf, pris en étau entre la hausse des coûts de construction et la perte de pouvoir d’achat des acquéreurs. En témoigne la chute des permis de construire des maisons individuelles, qui ont atteint leur niveau le plus bas en France depuis 2000, selon les chiffres du ministère de la Transition écologique.

Entre juillet 2023 et juin 2024, 124.600 permis pour des logements individuels (maisons et lotissements) ont été délivrés en douze mois, soit 18,1 % de moins sur un an. Pour Sylvain Massoneau, vice-président de la Fédération française du bâtiment (FFB), ce « cataclysme économique » que subit le secteur résulte directement de « choix politiques ». Il fustige particulièrement un « calendrier dramatique » dans la mise en application de deux mesures « très impactantes » : la loi Elan de 2018 et la réglementation environnementale (RE 2020) sur les performances énergétiques des bâtiments. La remontée des taux d’intérêt et la suppression en avril dernier du prêt à taux zéro ont également entamé la capacité des ménages à investir dans l’immobilier.

Moins de 50.000 maisons construites

Avec le Covid et la guerre en Ukraine, « deux événements majeurs qui ont marqué au fer rouge nos professions », il était « irresponsable de nous lancer dans ces enjeux-là. On construisait à peu près 150.000 maisons par an en France, là, on est tombé à moins de 50.000 », souligne-t-il. « Le marché est en train de s’éteindre », prévient Sylvain Massonneau, qui affirme que près de « 10.000 emplois sont détruits tous les mois » dans le secteur. « En France aujourd’hui, on construit beaucoup moins de logements qu’il y a de besoin, prévient Damien Hereng, président de la Fédération des constructeurs de maisons individuelles. On se dirige vers une période noire si les pouvoirs publics ne prennent pas le problème à bras-le-corps ».

Selon le ministère du Logement, il faudrait construire 370.000 logements par an, « mais cette année on table plutôt sur 220/230.000 logements », précise le président des constructeurs.