Les Crocs sont le fruit inattendu de l'union improbable entre le sabot suédois et l'esprit commercial américain incarné par McDonald’s. Elles empruntent la forme du premier et le sens des affaires du second. Un tel mélange n'est pas simple à réussir, car tirer profit d'un produit jugé inesthétique n'est pas donné à tout le monde. Ces sabots en mousse perforés partagent aussi avec le géant du hamburger une contestation de leur expansion. Les détracteurs des Crocs n’ont pas tout à fait tort.
Leur critique se concentre principalement sur l’esthétique, ou plutôt l'absence d’esthétique de ces chaussures. En effet, il n’y a pas de débat : un aspect général peu attrayant, une forme lourde, des couleurs criardes, des trous disgracieux sur le dessus, et un logo de crocodile mal dessiné. En somme, c’est la laideur faite chaussure. Une aversion qui pousse certains blogueurs à encourager des actions de destruction. Pour brûler ou détruire ces sabots en plastique, vous pouvez suivre les tutoriels du site « Ihatecrocs dot com ». Vous verrez que ce n’est pas une tâche facile, car les Crocs sont à la fois laides et quasiment indestructibles.
Inesthétiques mais confortables
Il est facile de juger que les Crocs sont moches, d'autant plus que la marque elle-même le reconnaissait à ses débuts, mettant ainsi davantage en avant leur confort. Sur le plan esthétique, l’évaluation est plus complexe. Les philosophes débattent depuis longtemps de la beauté et de son contraire absolu : la laideur.
Le concept de mocheté, sans doute trop vulgaire, reste une catégorie mal définie en philosophie esthétique. Il ne faut pas la confondre avec la laideur, qui repousse et dégrade l’humain. La mocheté ne suscite pas un rejet aussi intense. « IhateCrocs dot com » est l'exception qui confirme cette règle. La mocheté peut agacer, mais elle peut aussi faire sourire, voire plaire par son caractère anticonformiste et anti-élitiste. On peut développer un goût pour le moche, mais pas pour le laid, qui relèverait alors du pathologique.